Actualités des ENR

Ecrit par

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Olivier Fazio

Counsel
France

Counsel au sein de l'Equipe Energie, j'interviens sur toutes les thématiques de droit public et droit de l'environnement.

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Sibylle Weiler

Partner
France

Spécialiste expérimentée des énergies renouvelables avec une connaissance approfondie du marché français et allemand, je conseille les développeurs, les investisseurs et les institutions financières sur tous les aspects de leurs projets liés à ce secteur, y compris leur financement

1. Plan de relance de l’économie : focus sur le soutien aux énergies propres

Pour stimuler la reprise de l’économie suite à la crise du coronavirus, les programmes d’investissements européen et nationaux ciblent le développement des énergies propres. La commission européenne a en outre relevé à 55% son objectif de réduction des gaz à effet de serre 2030 par rapport à 1990, contre 40% aujourd'hui.

Amélioration de l’efficacité énergétique : l’Union européenne a, dans cet objectif, adopté le 8 juillet dernier deux stratégies : la première pour l’intégration du système énergétique. 38 mesures ont ainsi été adoptées afin de promouvoir un système énergétique plus circulaire et plus efficace, une électrification à partir d’énergies renouvelables pour des secteurs alimentés aux énergies fossiles et des combustibles plus verts (hydrogène décarboné, biocarburants et biogaz durables).

Le plan national France Relance présenté le 3 septembre 2020 par le Premier ministre prévoit un investissement massif de 100 Md € - dont 40 Md € provenant de l’Union européenne – largement fondé sur la transition énergétique. Il est prévu notamment de renforcer et accélérer la rénovation énergétique des bâtiments publics (4 Md €), des TPE et PME (200 M €), des logements sociaux (500 M €) et des logements privés (2 Md €).

Développement de l’hydrogène vert : la seconde stratégie de l’Union européenne est celle du soutien au développement de l’hydrogène décarboné, organisée progressivement en trois phases :

o De 2020 à 2024, il s’agira de décarboner la production d’hydrogène existante et de la promouvoir pour de plus amples applications. Cette phase repose sur une capacité installée d’au moins 6 GW d’électrolyseurs d’ici à 2024.

o De 2024 à 2030 « l’hydrogène devra faire partie intégrante de notre système énergétique intégré, avec une capacité d’au moins 40 GW d’électrolyseurs pour la production d’hydrogène renouvelable et une production allant jusqu’à 10 millions de tonnes d’hydrogène renouvelable dans l’UE ».

o Enfin, de 2030 à 2050, Bruxelles estime que « les technologies utilisant l’hydrogène renouvelable devraient atteindre leur maturité et être déployées à grande échelle dans tous les secteurs difficiles à décarboner ».

Sur le plan national, 7 milliards d’euros sont engagés pour le développement de l’hydrogène décarboné (dont 2 Md € dans le plan France Relance).

Dans le but de « créer et structurer un écosystème industriel de pointe qui soit compétitif à l’international », trois priorités ont été identifiées : décarboner l’industrie, développer une mobilité lourde à l’hydrogène vert et soutenir la recherche et l’innovation française.

Pour ce faire, différents mécanismes de soutien seront mis en place, dont la possibilité pour les producteurs d’hydrogène décarboné d’émettre des garanties d’origine ou de bénéficier d’un complément de rémunération (via appels d’offres).

Tant au niveau national qu’au niveau européen, il s’agira de favoriser la production d’hydrogène « renouvelable ». En effet, n’étant qu’un vecteur énergétique et non directement une source naturelle d’énergie, il faut, pour atteindre l’objectif de neutralité, que l’hydrogène soit lui-même produit au moyen d’électricité d’origine renouvelable. L’essor de l’hydrogène vert impliquera donc, en plus de la création de centrales de production et d’unités de stockage et de distribution dédiées, la poursuite d’un développement soutenu des énergies éoliennes et photovoltaïques à même de fournir aux centrales hydrogène de l’électricité d’origine renouvelable. Le cadre juridique applicable aux centrales de production hydrogène (autorisation environnementale, notamment) et aux installations de stockage et de distribution devra lui aussi être précisé.

2. Textes publiés

L’ordonnance n°2020-891 du 22 juillet 2020 réforme les procédures devant le Comité de règlement des différends et des sanctions (Cordis) de la Commission de régulation de l’énergie :

Le Cordis est chargé de régler les différends portant sur l’accès aux réseaux publics de l’électricité et du gaz et de sanctionner les infractions au code de l’énergie.

Cette ordonnance codifie la pratique décisionnelle du Cordis : caractère contradictoire de l’instruction et de la procédure et publication des décisions sur le site de la CRE (sauf lorsqu’il faut assurer la garantie des secrets protégés par la loi et des données à caractère personnel). Elle renforce également les droits de la défense lors d’une procédure de sanction et précise les délais de prescription (3 ans à compter du manquement en matière de sanctions, tandis que concernant les demandes de règlement des différends, c’est la prescription de droit commun prévue par le Code civil qui s’applique désormais).

Les obligations environnementales de l’exploitant éolien ont été renforcées : l’arrêté du 22 juin 2020 portant modification des prescriptions relatives aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent et applicable à compter du 1er juillet 2020 crée de nouvelles obligations environnementales à la charge de l’exploitant d’un parc éolien.

o Le suivi environnemental doit désormais débuter dans les 12 mois qui suivent la mise en service de l’installation. Le suivi devra être renouvelé sous 12 mois dans le cas où le précédent aura révélé un impact significatif impliquant des mesures correctives. Puis, le suivi sera renouvelé à minima tous les 10 ans d’exploitation.

o Le suivi environnemental doit être conforme au protocole de suivi reconnu par le ministre en charge des installations classées. Ce protocole exige que, en l’absence de standard finalisé, les données brutes soient transmises par l’exploitant au Muséé National d’Histoire Naturelle afin d’approfondir les connaissances relatives aux impacts des éoliennes sur l’avifaune et les chiroptères.

o Lors du démantèlement du parc, la remise en état du site implique l’excavation de la totalité des fondations, sauf s’il est prouvé que le bilan environnemental du décaissement est défavorable. De plus, les aires de grutage et les chemins d’accès doivent être décaissés sur une profondeur de 40 cm et remplacés par des terres de caractéristiques comparables aux terres voisines.

o A partir du 1er juillet 2022, 90% de la masse totale des aérogénérateurs (dont 35% de la masse du rotor – qui concentre les difficultés de recyclage) devra être réutilisée ou recyclée. Afin de respecter le principe de hiérarchie de traitement des déchets, l’exploitant devra être en mesure de connaître les composants des aérogénérateurs de son parc.

o La formule de calcul du montant des garanties financières à constituer initialement et au moment de la réactualisation à la suite d’une modification est redéfinie en prenant en compte la puissance unitaire des aérogénérateurs (50 000 € pour une éolienne de 2 MW + 10 000 € par MW supplémentaire).

Afin de soutenir les investissements solaires dans le contexte de crise sanitaire, la baisse prévue des tarifs d’achat d’électricité photovoltaïque sur bâtiment a été limitée par l’arrêté du 30 mars 2020. Les deux baisses successives de 5,4% chacune pour les primes et tarifs applicables aux installations de puissance comprise entre 9 et 100 kW prévues par l’arrêté tarifaire du 9 mai 2017 sont gelées au trimestre dernier et diminuées de 2,7% pour le trimestre allant du 1er juillet au 30 septembre 2020.

De plus, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) recommande une révision des modalités de calcul des coefficients de dégressivité dès le second semestre 2020 pour améliorer la cohérence entre le petit photovoltaïque et les objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie.

A plus long terme, la Commission estime nécessaire, après 13 trimestres d’ajustement automatique, de réétalonner le dispositif de soutien tarifaire sur les segments concernés par les arrêtés encadrant le développement du petit photovoltaïque en métropole et en Zone Non Interconnectée (ZNI). La CRE formulera prochainement ses recommandations.

Obligation d’achat du biométhane  : L’article L. 446-2 du Code de l’énergie prévoit que certains fournisseurs de biogaz sont tenus de conclure un contrat d’achat avec tout producteur qui en ferait la demande. Ces acheteurs obligés étaient, sous l’empire de l’ancien article D. 446-14 du Code de l’énergie, désignés pour 5 ans sur la base du volontariat en répondant à un appel à candidature. Dorénavant, tous les fournisseurs sont acheteurs obligés dès lors qu’ils remplissent les critères fixés par le décret n°2020-787 du 25 juin 2020.

Il s’agit de ceux dont les ventes de gaz naturel à des clients finals au cours de l’année précédente ont été supérieures à 10% de la consommation nationale de gaz naturel sur cette période.

Le texte précise également les délais dans lesquels l’acheteur de dernier recours est tenu de conclure ce contrat d’achat.

La liste des acheteurs de dernier recours pourra être consultée sur le site internet du ministère chargé de l’énergie.

3. Jurisprudences

Urbanisme : La durée de validité d’un permis de construire est suspendue en cas de recours à l’encontre du permis modificatif.

Le Conseil d’Etat a jugé que le recours contentieux formé par un tiers à l’encontre d’un permis modificatif suspendait le délai de validité du permis de construire jusqu’à l’intervention d’une décision juridictionnelle irrévocable. Plus précisément, le juge considère qu’il résulte de la combinaison des articles R. 424-17 et R. 424-19 du Code de l’urbanisme que, si la délivrance d’un permis de construire modificatif n’a pas pour effet de faire courir à nouveau le délai de validité du permis de construire initial, le recours contentieux formé par un tiers à l’encontre de ce permis modificatif suspend ce délai jusqu’à l’intervention d’une décision juridictionnelle irrévocable. Cette précision tend à préserver les intérêts des porteurs de projets lorsqu’ils modifient leur permis. (CE, 19 juin 2020, n°434671)

Recours d’une société exploitant un parc éolien contre une autorisation délivrée à proximité : le Tribunal administratif retient l’irrecevabilité pour défaut d’intérêt à agir, dès lors que « les sociétés requérantes ne justifient pas que les inconvénients ou dangers qu’elles allèguent tendant à protéger les intérêts prévus par l’article L.  81-3 du Code de l’environnement affectent directement leurs intérêts propres ». Pour se prononcer ainsi, le juge administratif apprécie le caractère suffisamment direct de l’atteinte portée par le futur parc aux parcs existants.

En l’espèce, notamment, si les sociétés requérantes soutiennent que l’implantation de nouvelles éoliennes aurait un impact visuel et sonore excessif, le juge considère que ces inconvénients, fussent-ils fondés, ne constituent pas un risque susceptible d’aggraver les conditions d’exploitation des requérantes (TA Lille, 18 juin 2020, n°1704921). Cette décision est de nature à permettre effectivement une densification des parcs éoliens au sein des secteurs favorables.

L’épidémie de COVID-19 peut constituer un cas de force majeure :

Par application de sa clause de force majeure, l’accord-cadre conclu entre Electricité de France (EDF) et Total Direct Energie (TDE), conformément à l’accord type adopté par arrêté ministériel, peut être suspendu. En effet, la baisse significative de consommation d’énergie par les clients de TDE ne permet plus à ce dernier d’exécuter son obligation d’achat d’énergie dans des conditions économiques raisonnables. La force majeure est définie dans le contrat comme « un évènement extérieur, irrésistible et imprévisible rendant impossible l’exécution des obligations des parties dans des conditions économiques raisonnables ». Cette décision, rendue par le juge des référés, ne pourra pas être étendue à l’ensemble des contrats qui seraient devenus temporairement non rentables en raison de l’épidémie, en ce que le contrat définit la force majeure de façon plus extensive que la loi. A défaut d’une telle redéfinition contractuelle, l’obligation devra se révéler, comme l’exige la loi, impossible à exécuter. (CA Paris, 28 juillet 2020, n°20/06689, SA EDF c/ SA Total Direct Energie)

La Cour administrative d’appel de Nantes décide qu’une usine de méthanisation, en ce qu’elle permet la production d’énergies renouvelables, constitue - comme les centrales éoliennes et photovoltaïques - un équipement d’intérêt collectif. Cette qualification permet de déroger aux dispositions du plan local d’urbanisme relatives aux aspects extérieurs des constructions et à la protection des éléments du paysage. (CAA Nantes, 2e chambre, 17 juillet 2020, n°19NT02227)

4. Quelques chiffres clés

Eolien

Au 30 juin 2020, le parc éolien français atteint une puissance de 17 GW dont environ 0,4 GW a été raccordé au cours de l'année 2020, soit 45% de moins qu'au cours du premier semestre 2019. La puissance des projets en cours d'instruction s'élève à 13 GW. La production d'électricité éolienne s'est élevée à 21,4 TWh au premier semestre 2020, soit 9,5% de la consommation électrique française.

Concernant les éoliennes offshore, la capacité mondiale totale installée s’élève fin 2019 à 29,1 GW selon le dernier rapport du Global Wind Energy Council. La France était nettement en retard mais voit sa situation s’améliorer : deux parcs de 500 MW issus du premier appel d’offre pour l’éolien en mer devraient être fonctionnels en 2022.

Solaire

La puissance du parc solaire photovoltaïque atteint 10,1 GW fin mars 2020.

Au cours du premier trimestre 2020, 182 MW supplémentaires ont été raccordés, contre 170 MW au premier trimestre 2019. Ces nouveaux raccordements se concentrent principalement dans la moitié sud de la France continentale.

La production d'électricité d'origine solaire photovoltaïque s'élève à 2,3 TWh au premier trimestre 2020, en augmentation de 3% par rapport au même trimestre de 2019. Elle représente 1,7% de la consommation électrique française au premier trimestre 2020.

Biogaz

À la fin du premier semestre 2020, 828 installations produisant de l’électricité à partir de biogaz sont raccordées au réseau pour une capacité totale installée de 508 MW, soit une production d’électricité de 1,2 TWh (0,5% de la consommation électrique française). Au premier semestre 2020, 12 MW supplémentaires ont été raccordés et 59 MW figurent en file d’attente. La production électrique à partir de biogaz est en hausse de 9% par rapport à la production du premier semestre 2019.

 

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