Géo-blocage et discrimination nationale : c’est fini !

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Anne-Charlotte Le Bihan

Partner
France

Je suis associée au sein de l'équipe propriété intellectuelle de Paris. Au cours des 20 dernières années, j'ai acquis une vaste expérience dans tous les domaines de la propriété intellectuelle, en particulier en contentieux des brevets.

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Thomas Oster

Partner
France

Associé au sein du département Droit de la concurrence et compliance à Paris, ma pratique couvre le droit de la concurrence européen et national, tant en conseil qu'en contentieux, ainsi que le droit commercial et le droit de la distribution. J'ai également développé une compétence en matière de compliance.

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Alexandre Vuchot

Partner
France

Associé au sein du groupe Commercial, je suis plus particulièrement en charge des questions relatives au droit des contrats commerciaux de la distribution et de la consommation.

Le règlement européen 2018/302 visant à contrer le blocage géographique injustifié et d’autres formes de discrimination fondée sur la nationalité, le lieu de résidence ou le lieu d’établissement des clients dans l’Union européenne entre en vigueur ce jour, le 3 décembre 2018.

Ce règlement interdit aux entreprises :

de bloquer l'accès à leurs sites internet ou applications aux utilisateurs d'autres états membres de l'UE pour des motifs liés à leur nationalité, lieu de résidence ou d'établissement ;

de rediriger automatiquement les utilisateurs vers d’autres sites, typiquement le site de l’Etat membre dans lequel ils sont situés, sauf accord exprès de ces derniers ;

d'opérer une discrimination en ce qui concerne les conditions d’accès aux biens et services, ou les conditions applicables aux conditions de paiement pour des motifs liés à la nationalité, au lieu de résidence, ou au lieu d'établissement, ou au lieu de localisation du compte bancaire, ou du prestataire de services de paiement.

Objectif poursuivi

Ce règlement a pour objectif de contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur en éliminant les frontières recréées artificiellement par les opérateurs, notamment dans le cadre de la vente en ligne.

La Commission européenne a en effet constaté que lorsque des biens et services sont vendus à des prix différents en fonction des Etats membres, les vendeurs en ligne avaient tendance à mettre en place des mécanismes techniques (sur la base d’une localisation par l’adresse IP, par les données GPS ou par le choix de la langue) permettant de cloisonner les marchés et éviter ainsi que les clients puissent acheter les produits et services aux prix plus avantageux proposés à certains de leurs voisins européens. Ce règlement est destiné à mettre fin à ces pratiques.

Opérateurs et produits & services concernés

Le règlement s’applique à tous les opérateurs réalisant des ventes au sein de l’UE, sauf s’ils appartiennent au secteur des soins de santé, des services d’intérêt général non économiques, des services financiers, des services et réseaux de communications électroniques, des services dans le domaine des transports, des services des agences de travail intérimaire, des services audiovisuels, des activités de jeux d’argent, des activités participant à l’exercice de l’autorité publique, des services d’aide sociale, des services de sécurité privée ou des services fournis par les notaires et les huissiers de justice.
Le règlement ne s’applique qu’aux ventes aux utilisateurs finaux, peu importe cependant que ces derniers soient des consommateurs ou des entreprises.

Portée de l’obligation

Le règlement interdit toute restriction à l’accès aux produits et services et toute discrimination dans les conditions de vente, notamment les prix, les conditions de paiement ou de livraison, fondée sur la nationalité ou le lieu de résidence ou d’établissement de l’acheteur final au sein de l’UE.

Le règlement n'impose cependant pas aux professionnels de livrer les biens dans tous les pays de l’UE. Si un client est situé dans un pays de l’UE dans lequel le vendeur n’assure pas de services de livraison, le client devra se déplacer pour prendre possession du bien. Dans ce cas, le vendeur devra mettre à disposition les produits dans ses locaux ou à un point de retrait.

Par ailleurs, le règlement n’interdit pas de proposer des offres ciblées à certaines catégories de clients ou dans certains territoires, à condition qu’il n’existe pas de discrimination liée à la nationalité ou au lieu de résidence.

Enfin, des raisons légales ou réglementaires pourront justifier une restriction d’accès ou une réorientation vers un autre site (par exemple en raison d’une réglementation nationale restreignant la vente d’un produit dans un pays donné). Dans ce cas, l’utilisateur devra cependant en être informé.

Blocage géographique et droits de propriété intellectuelle

Le règlement prévoit qu’il ne porte pas atteinte aux règles applicables dans le domaine du droit d’auteur et des droits voisins.

Le règlement prévoit également une exclusion pour les services dont la principale caractéristique est de fournir un accès à des œuvres protégées par le droit d’auteur ou d’autres objets protégés ou de permettre leur utilisation, y compris la vente sous une forme immatérielle des œuvres protégées par le droit d’auteur ou des objets protégés.

Sont ici directement visés les plateformes de type Netflix ou Deezer, les livres électroniques ou encore les plateformes de diffusion d’évènements sportifs qui ne sont donc pas concernés par cette interdiction de blocage géographique.

Une exception est également prévue en matière de vente de livres, le règlement prévoyant le respect des lois nationales sur le prix unique.

En revanche, le règlement ne prévoit pas expressément d’exclusion pour les autres hypothèses mettant en cause les droits de propriété intellectuelle et leur application territoriale.

Les professionnels vont donc faire face à de nouveaux challenges en matière de contrefaçon puisqu’ils devront composer entre les règles mises en place par le nouveau règlement et la territorialité des droits de propriété intellectuelle.

Sanctions

Il revient à chaque Etat membre de désigner l’organisme chargé de contrôler l’application du règlement et de définir les mesures applicables aux violations du règlement. Ces mesures devront être "effectives, proportionnées et dissuasives".

A ce jour le gouvernement français n’a pas encore désigné l’organisme chargé de veiller à l’application de ces règles en France, même s’il est probable qu’il s’agira de la DGCCRF. Il n’a pas non plus défini les sanctions applicables.

Les équipes de Bird & Bird sont à votre disposition afin de vous aider à vous mettre en conformité avec ces nouvelles règles.

Visionnez notre vidéo sur l’application de ces nouvelles règles.

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